Bordeaux primeurs 2014 #1 Analyse complète de la météo…

primeurs 2014, dégustation UGCB
primeurs 2014, dégustation UGCB

Tout d’abord, avant commencer cette chronique quelques chiffres clé sur la dernière campagne de bordeaux primeurs 2014…

C’est avec l’UGCB (Union des Grands Crus de Bordeaux*) que je participe chaque année aux dégustations primeurs à Bordeaux et ça dure depuis quelques belles années déjà ! Cette dernière édition de primeurs 2014 était un très bon cru paraît-il. Déjà en ce qui concerne sa fréquentation, pas la moindre, soit 5966 visiteurs différents dont plus de 20% d’étrangers. En cumulé, la fréquentation totale de cette année correspond à 20 154 entrées, une progression de 20% par rapport à l’édition précédente (celle de primeurs 2013). 69 pays étaient représentés, bien évidemment l’ensemble des marchés principaux des Grands Crus de Bordeaux étaient là comme : Royaume-Uni, la Chine, Hong Kong, la Belgique, la Suisse, les USA, l’Allemagne…  

Il y a des années où la nature est généreuse, tout se passe facilement, sans aucun incident, mais c’est quand même plutôt rare…

La décennie 2000-2010 a vraiment gratifié Bordeaux d’une collection de quelques grands millésimes, tandis que le début de la décennie suivante avec les 2011, 2012, 2013 laisse à désirer…

Vieux Cabernets Sauvignon
Vieux Cabernets Sauvignon

Et enfin arrive 2014, très satisfaisant : « On a sorti un bon millésime, ce qui était inespéré l’été dernier. On a des vins séducteurs sur le plan aromatique avec une belle structure tannique. Sans doute le meilleur depuis 2010. Ce n’est pas un scoop, mais c’est une bonne nouvelle ! » Alain Raynaud, Président du Grand Cercle des vins de Bordeaux

Pour comprendre un millésime, il faut surtout comprendre sa météo avec tous ces aléas climatiques. Bref, comme à l’accoutumée, chaque année Pr. Denis Dubordieu décortique toute la climatologie du millésime en question, bien entendu avec son humeur bien à lui mais sans perdre la notion du réel.

Prof Denis Dubordieu
Prof Denis Dubordieu

Avant toute chose, Denis Dubordieu rappelle toujours les 5 conditions déterminant le millésime parfait de bordeaux rouge :

1) et 2) Une floraison et une nouaison précoces et relativement rapides sous un climat assez chaud, pas trop arrosé propice à une bonne fécondation, assurant des rendements satisfaisants et prédisposer à une maturité homogène.

3) Une contrainte hydrique s’établissant progressivement grâce à un mois de juillet chaud et sec, provoquant le ralentissement puis l’arrêt définitif de la croissance de la vigne avant la véraison. Si ce beau temps n’arrive qu’en fin de maturation, il profite mieux aux Cabernets qu’au Merlot.

4) Une maturation complète des différents cépages grâce à des mois d’Août et Septembre suffisamment secs mais sans chaleurs excessives.

5) Un beau temps moyennement chaud et faiblement arrosé pendant les vendanges permettant d’attendre la maturité optimum de chaque parcelle sans redouter la dilution ou la pourriture des cépages tardifs.

En raison d’une floraison débutée dans les derniers jours de mai sous un climat trop froid mais heureusement poursuivie par temps chaud et ensoleillé, 2014 ne remplit que partiellement les deux premiers des conditions.

Il ne satisfait pas pleinement non plus la troisième, tant juillet frais et moyennement arrosé, interdit tout arrêt de croissance avant la véraison.

Après un mois d’août froid, gris et relativement humide, l’exceptionnel mois de septembre, chaud, sec et ensoleillé permit à 2014 de remplir partiellement la quatrième condition.

Quant à la cinquième, parfaitement remplit grâce à octobre estival, chaud, peu arrosé, autant que lumineux et ensoleillé.

primeurs 2014

Bref septembre et octobre ont sauvé le millésime au-delà des espérances et l’ont fait un bon, même très bon notamment grâce aux Cabernets.

Pour les vins blancs secs c’est une autre histoire… leur réussite nécessite des raisins sains, sucré, fruités, suffisamment acides et à pellicules peu tanniques. Cet équilibre s’obtient aisément, sur les terroirs appropriés, si l’été est tempéré, sans chaleur et ni sécheresse excessive après la véraison. Evidemment, la fraîcheur de juillet et août 2014 ainsi que le temps clément de septembre furent propice à un beau millésime de blanc sec.

dégustation UGCB Sauternes 2014
dégustation UGCB Sauternes 2014

Sauternes et Barsac

En raison de journées chaudes et sèches de septembre, la pourriture noble ne s’installa que très lentement sur des raisins sucrés et exceptionnellement acide. Elle ne connut un développement généralisé qu’à partir de la mi-octobre. Le climat stable, chaud et sec de la fin octobre permit de rentrer la majeure partie de la récolte dans des conditions idéales, donc le millésime 2014 peut être considérer comme un très bon, même dans certains cas un excellent millésime de Sauternes et Barsac.

Voici quelques propos des œnologues, consultants, propriétaires de ceux qui sont au cœur des vignes, au cœur des chais, bref de ceux qui font du vin avec la matière que la nature leurs donne…

Pierre Lurton analyse 2014 à Cheval Blanc et Yquem, pour lui il y a une certaine similitude avec le 2001…

Alain Reynaud avec une certaine sagesse compare le 2014 avec le 2008…

« 2014 est un millésime si particulier que l’on a bien du mal à le comparer. Encore un exemple qui nous met face à l’inconnu. Ce que l’on n’a pas eu avant, nous l’avons eu après : le soleil, la chaleur, la lumière ! , une particularité très forte de ce millésime. Un contraste aussi marqué entre le début et la fin de l’été, comme si on avait inversé les saisons, ne rappelle aucun autre millésime.

Petit à petit les différents cépages nous ont montré leur visage… Les vins 2014 sont droit, mais pas stricts, ils sont onctueux sans lourdeur, tendus sans verdeurs, tout simplement grands » Eric Boissenot, œnologue

À-propos :

Olivier Bernard, Président de UGCB
Olivier Bernard, Président de UGCB

*Union des Grands Crus de Bordeaux présidé par Olivier Bernard (Domaine de Chevalier)

Association crée en 1973 qui regroupe aujourd’hui 133 Grand Crus provenant des appellations les plus nobles de la Gironde : Médoc, Haut-Médoc, Saint-Estèphe, Pauillac, Saint-Julien, Margaux, Moulis, Listrac, Graves, Pessac-Léognan, Sauternes, Barsac, Saint-Emilion et Pomerol, ayant en commun une même exigence qualitative.

Et comme on dit toujours que la vérité se trouve au fond d’un verre, donc on passe à la dégustation et quelques notes dans les chroniques qui vont suivre… en tout cas je me consacre surtout aux coups de cœur et pas vraiment aux coups de gueule…